LE VIN
Le vin est un breuvage magique. C’est aussi l’un des plus extraordinaires aliments qui puisse exister. Rouge ou blanc, le vin est un liquide formé d’eau (800 à 950 g/l) qui contient en dissolution ou en suspension la plupart des grandes fonctions de la chimie organique. Une véritable alchimie naturelle se crée alors au cours de la fermentation du vin. Si son élément essentiel est l’alcool éthylique qui se transforme au cours de la fermentation, les phosphates et les lipides côtoient les vitamines, les glucides ou les éthers, et font de ce produit fermenté (bien avant le pain et le fromage) un élixir de longue vie qui entretient notre corps régulièrement si l’on préfère déguster que boire à tout va.
L’ÉLABORATION DES VINS ROUGES
L’élaboration du vin est un processus parfaitement naturel. Lorsque la vendange arrive à la cave, il vaut toujours mieux la trier. La vendange passe tout d’abord dans le fouloir, où elle est légèrement écrasée après avoir été la plupart du temps éraflée. Le moût, qui contient le jus, les pellicules et les rafles, est alors transvasé dans des cuves (en acier inoxydable ou en ciment). La fermentation va commencer. Ce sont les levures, des champignons microscopiques, qui en sont responsables en s’attaquant au sucre que le raisin contient pour le transformer en alcool avec émanation de gaz carbonique. Le processus de fementation démarre à 18° C. Cette étape dure de quelques heures (ou jours) pour des vins très légers (vin d’une nuit, Beaujolais), et jusqu’à 4 semaines pour les grands vins rouges tanniques. Le chauffage du moût et l’emploi de levures artificielles activent cette opération. On peut renforcer le degré alcoolique par l’adjonction de sucre au moment de la cuvaison (chaptalisation), d’environ 2 à 3°. On comprend que pour qu’un vin soit rouge, il faut que les pigments de la peau des raisins soient dissous dans le jus incolore.
La structure tannique et la couleur du vin sont donc apportées par la peau du raisin, à une température située entre 25 et 28° C. Au-dessous de 10°, la fermentation cesse; au-delà de 35° C, les levures sont tuées par la chaleur. Plus le vin macère avec ses peaux de raisins, plus il acquiert de la charpente et de la couleur. Les fermentations chaudes contribuent à l’extraction des polyphénols et des tanins indispensables à l’élaboration des grands vins de garde. Durant cette étape, les éléments solides (c’est ce que l’on appelle le “chapeau”) remontent à la surface des cuves et sont régulièrement soit arrosés par le jus de la cuve (remontage), soit submergés (pigeage), afin d’augmenter les extractions. Durant la maturation, étape suivante de la vinification, le vin va subir une nouvelle modification, la fermentation malolactique, durant laquelle des bactéries transformeront l’acide malique en acide lactique. La fermentation terminée, c’est l’écoulage, période durant laquelle on soutire le vin de goutte, puis le vin de presse (voir Le Vocabulaire des vins).
En fonction du style de vin que l’on veut faire, on peut incorporer un pourcentage plus ou moins important de vin de presse (contribuant au potentiel de longévité) dans le vin de goutte. Le vin est prêt soit pour être mis en cuves (de quelques jours à plusieurs mois), soit pour être élevé en barriques (de quelques mois à deux années). Tout dépend de la qualité du millésime et du vin que l’on veut faire.
L’ÉLABORATION DES VINS ROSÉS
Si l’on trouve encore (hélas !) des vins rosés fabriqués en mélangeant du rouge et du blanc, un vrai rosé est tout simplement un vin rouge auquel on n’a pas laissé le temps de prendre sa couleur.
Les rosés de pressurage
Ils sont issus d’une vinification en blanc de raisins noirs, foulés, égouttés et pressurés. Le pressurage est incorporé au vin de goutte pour lui donner de la couleur. Leur élaboration s’apparente plus à celle des vins blancs (voir plus loin).
Les rosés de saignée
Les meilleurs, à mon sens, en tout cas ceux qui ont le plus de saveur et de finesse. Ce sont des vins issus d’une séparation du moût d’une vendange de vin rouge, égrappée (ou non) et foulée, après seulement quelques heures de macération. La cuve est alors “saignée”, c’est-à-dire qu’on en écoule une partie, le reste poursuivant sa vinification en rouge. Le jus écoulé poursuivra sa fermentation hors du contact des peaux, pour ne pas prendre de couleur, et fera sa fermentation malolactique.
L’ÉLABORATION DES VINS BLANCS SECS
Le vin blanc est élaboré à partir de raisins blancs et/ou noirs égrappés au fur et à mesure qu’ils sont pressés. Plus on presse, plus la qualité diminue. L’opération doit être faite rapidement car le moût doit être surtout bien protégé de l’oxydation, en évitant tout brassage, et en ajoutant de l’anhydride sulfureux, antioxydant et antioxydasique. On procède ensuite à la séparation avant la fermentation des bourbes du jus clair (débourbage), soit de manière naturelle (par sédimentation), soit volontaire (centrifugation…). On peut laisser la peau macérer avec le moût durant quelques heures afin d’intensifier l’arôme. Le jus clair est alors dirigé vers les cuves de fermentation (ou les barriques, pour les très grands crus). Des levures sélectionnées sont ajoutées au vin dans la cuve. La fermentation s’effectue à une température située entre 12 et 20° C, et principalement autour de 15° C. Si besoin, les cuves doivent être rafraîchies électroniquement, ou par arrosage extérieur ou encore par des serpentins remplis d’eau fraîche. Selon le type de vin blanc sec recherché, on peut décider de stopper ou non la fermentation malolactique, qui apporte de la rondeur au vin mais lui faire perdre de l’acidité. La plupart des blancs secs sont ensuite stockés dans des cuves avant d’être mis en bouteilles. Quelques-uns (Bourgogne notamment) sont élevés, voire vinifiés en barriques, comme les rouges.
L’ÉLABORATION DES VINS BLANCS DOUX
S’il est possible de faire des vins doux artificiellement en ajoutant du dioxyde de soufre ou en ôtant les levures de la cuve pour faire cesser les fermentations, il vaut mieux employer un processus plus naturel. Les vins sont alors obtenus en arrêtant la fermentation tandis qu’il reste encore du sucre. Bien entendu, les meilleurs sont les vins issus de raisins atteints par le Botrytis cinerea, qui a le pouvoir d’augmenter la teneur en sucre des raisins. Le raisin doit parvenir à une forte concentration de maturité due à l’action du Botrytis cinerea, dénommé aussi “pourriture noble”. Cette dégradation bénéfique du raisin lui fait perdre son eau, accroît sa teneur en alcool et apporte au vin un surcroît de liqueur.
L’ÉLABORATION DES VINS MOUSSEUX
La méthode champenoise
En Champagne comme ailleurs, la méthode de la prise de mousse consiste à additionner au vin tranquille obtenu après de subtils coupages et assemblages une liqueur de tirage dont la dose de sucre est définie selon le type de produit que l’on désire, et d’un levain de levures sélectionnées (voir région Champagne).
La méthode gaillacoise
Ou rurale. Par rapport à la méthode champenoise, le vin ne subit pas de seconde fermentation en bouteilles. Il est embouteillé durant la première fermentation, qui se poursuit donc en bouteilles.
© Editions Albin Michel/Dégustations Dussert