Les vins de L’Espagne centrale

L’Estrémadure
Une seule DO, Tierra de Barros, située au sud de cette région étendue et sauvage qui longe le Portugal. C’est le rouge que j’ai trouvé assez réussi, provenant des Tempranillo, Garnacha et Graciano, au nez intense, “chaud” et puissant.

Castilla-Leon
Au sud-ouest de la Rioja, de l’autre côté de la Sierra de la Demanda, commence la grande région de Castille, habituellement divisée en deux parties : Castilla-Leon et Castilla-La Mancha. Quatre Dénominations d’Origine à retenir dans la région de Castilla-Leon.

– Bierzo
Très peu connue, une DO où l’on produit des vins des trois couleurs, les rouges et rosés étant issus des cépages Mencia et/ou Garnacha.

– Ribera del Duero
C’est la région du fameux Vega Sicilia, un bon exemple de la notion même de la typicité d’un cru, puisque ces mêmes supporters apprécient surtout l’omniprésence de fûts et de cépages qui n’ont pas grand-chose à voir avec l’Espagne (Cabernet-Sauvignon, Malbec, Merlot), et viennent épauler le riche cépage local majoritaire Tinto Fino. Un Vega Sicilia, c’est donc rare, très bon, intense et savoureux, d’excellente garde, mais c’est aussi moins typé que ne peuvent l’être des rouges de la même appellation. On trouve aussi de bons rosés, secs et parfumés.

– Rueda
Une DO spécialisée en vins blancs (cépage Verdejo très majoritaire, puis Viura et Palomino). Un bon rosé issu de Garnacha.

– Toro
Non loin de Rueda, une petite appellation où vous découvrirez des rouges classiques (cépage Tinta de Toro), colorés et corsés, de bonne évolution. Quelques blancs bien vinifiés, provenant des cépages Malvasia ou Palomino, et surtout des rosés à la fois secs et ronds, bien fruités.

Castilla-La Mancha
Trois vignobles, Mentrida, Valdepenas et La Mancha, qui rejoint les premiers vignobles d’Almansa.

– Mentrida
Le vignoble, difficile à cataloguer, se situe juste entre les deux grandes parties de la Castille, la Castilla la Lora (ou vieille Castille) et la Castilla la Neuva, dénommée aussi la Castilla la Mancha, dans une région que vous traverserez en allant de Madrid à Tolède. Des vins rouges et rosés corrects, issus principalement du cépage Garnacha, corsés et puissants, avec cette pointe d’amertume caractéristique. Le rosé tient bien, un peu frais, sur une paella.

– La Mancha
Le pays de Don Quichotte, austère, est aussi un véritable océan de vignes : la région de la Mancha est la plus vaste Denominacion de Origen du monde et tous les villages que vous traverserez (Manzanares, Tomelloso…) ne vivent que par le vin.

Mancha provient de l’arabe manxa ( “terres arides”) et ces sols où courent les vignes à la recherche de fraîcheur produisent des rendements qui feraient pâlir d’envie la plupart des vignerons. Le climat est toujours rude ici, continental, semi-aride, et les “petites” années sont un concept pratiquement inconnu des viticulteurs de la Mancha. Tout cela serait pour le mieux si l’on ne cultivait que des cépages rouges, très adaptés ici. Pourtant, paradoxe oblige, plus de 80% des vignobles sont plantés avec le (très) prolifique cépage blanc Airén (on se demande parfois le pourquoi de telles absurdités). Partout, on fait donc des vins blancs, du sec au douceâtre, beaucoup plus marqués par leur vinification (maîtrise des températures…) que par leur terroir, bien faits certes mais bien souvent “sans vice ni vertu”, et la plupart des coopératives de la région en proposent. Je préfère les rouges bien typés par le Cencibel (version manchega du Tempranillo).

– Valdepenas
Ce sont très certainement les bergers ibères, nomades et errants, fatigués de la transhumance, qui décidèrent de s’installer sur les rives du Jalon, dans une vallée de Penas. C’est là, sur le coteau, qu’ils plantèrent le premier vignoble. La grande impulsion de Valdepenas ne vint, cependant, qu’à partir du XVIIIe siècle, lors de la construction du chemin royal qui reliait la capitale de l’Espagne à l’Andalousie. Les tonneaux et les jarres font ainsi la conquête de plusieurs marchés grâce à la qualité des vins qu’ils transportent. Aujourd’hui, ce sont surtout les cuves en acier inoxydable que l’on rencontre dans ce pays. La DO Valdepenas est plantée sur des terrains du miocène, composés d’argiles, de marnes et de sables autour de Valdepenas, Alcubillas, Moral de Calatrava, San Carlos del Valle, Santa Cruz de Mudela, Torrenuva, Torre de Juan Abad, Granatula de Calatrava, Alhambra et Montiel. Les blancs issu du cépage Lairen (ou Airen) sont en l’occurrence assez peu corsés, légers en bouche, et peu alcoolisés. Quelques rosés bien faits, et surtout des rouges (cépages Airen et Cencibel) qui ont plus de corps, intenses, fruités, ronds et savoureux en bouche, très attirants par leur originalité. C’est un bon exemple de la typicité de crus épicés, auxquels il faut savoir s’habituer, sans vouloir les comparer avec d’autres vins.

La région de Valence

Plusieurs DO : Utiel-Requena, Valencia et Alicante, puis, en remontant vers l’ouest, mitoyens, les vignobles de Murcie (Yecla, Jumilla), et celui d’Almansa, qui rejoint la région de la Mancha, vers Albacete. Les aires vinicoles se concentrent autour de Valence et d’Alicante. Les Grecs et les Phéniciens importaient déjà du vin des ports de Denia et Javea, et ce commerce florissant a stimulé l’expansion du vignoble jusqu’aux autres régions. Du temps des Romains, des chroniques de Martial et Pline faisaient déjà l’éloge des vins de Sagunto. La région offre une gamme de vins très variée, allant des rosés fruités de Utiel-Requena (voir plus loin) aux rouges corsés du Alto Turia d’Alicante, en passant par des blancs intéressants, des rosés et rouges plus ou moins doux, qui peuvent aller de 11° (et parfois moins) jusqu’aux “pâteux” qui atteignent 16° naturels.

– Utiel-Requena
Située à l’extrémité ouest de la province de Valencia, à une altitude moyenne de 700 mètres, cette zone a, elle, surtout une production de vins rouges et rosés issus des Tempranillo, Garnacha et Bobal.

– Valencia
L’appellation est divisée en trois zones (subzons) différentes : Valencia-Alto Turia (2 700 ha), au nord-ouest de la province de Valencia, à une altitude moyenne de plus de 600 mètres, sur un terrain limon-sablonneux, où l’on produit principalement un vin blanc sec issu du Merseguera ; Valencia-Valentino, une zone située dans la partie centrale de la province, avec une altitude moyenne de 250 mètres, sur un terrain calcaire. Des rouges corsés et savoureux issus des Bobal, Garnacha et Tintorera, et des blancs tout aussi typés, mais parfois décevants, provenant des cépages Merseguera, Malvoisia et Pedro Ximénez ; et Valencia-Clariano enfin, au sud de la province, où se cultivent les cépages Monastrell et Garnacha pour les rouges, Merseguera, Malvasia et Tortosi pour les blancs. Au nord de la région, se trouve la province de Castellon.

Alicante
Cette zone, où l’on produit surtout des vins rouges, s’étend à une altitude de 350 à 500 mètres, sur des sols principalement calcaires. Les vins que j’ai retenus sont colorés, classiques de la production espagnole, assez corsés, parfois un peu trop alcoolisés, mais généralement bien faits, comme ceux de la maison Eval. La contrée de La Marina complète cette région, qui est une zone côtière située au nord où s’élabore un excellent muscat.

Yecla
Un petit territoire enclavé entre les vignobles d’Alicante et de Jumilla, au sol pierreux et calcaire. De bons rouges, très colorés, intenses au nez comme en bouche, bien équilibrés.

Jumilla
J’ai dégusté d’assez bons blancs issus principalement du Lairen , relativement corsés, fruités et frais. En rouges, le bon Monastrell.

Almansa
L’appellation s’étend entre les vignobles de Valence et les premières terres de la Mancha. Un bon rouge (Cencibel majoritaire, Monastrell et Garnacha), de couleur rubis, corsé, associant rondeur et structure.