Un vrai vin, sinon rien

Un vrai vin, c’est tout ce que l’on demande. Un vin vraiment marqué par son terroir, sans fioritures, un vin aux arômes naturels de fruits ou de fleurs, pas un produit qui “pue” le bois, un vin distingué, tout en rondeur, pas un vin confituré, concentré à outrance, etc. Vous l’avez compris, il s’agit de savoir choisir désormais entre un vin digne de ce nom et un autre, tant on peut déboucher des bouteilles chères et décevantes, d’un cru renommé comme d’un vin de pays. La mode, la facilité, l’aseptisation du goût sont monnaie courante dans tous les vignobles et nous devons, aujourd’hui plus qu’hier, soutenir les vignerons qui pensent comme nous.

Globalement -vous lirez tout cela en détail dans le Guide- un bon nombre de vins rouges (bordelais certes, où le phénomène est exacerbé, mais pas seulement, le Languedoc, et même la Bourgogne suivent) sont en effet “sans âme ni vertu”, flatteurs mais inintéressants, “putassiers” étant le mot juste. Pour les blancs, on va vers une exagération de la rondeur au détriment de l’acidité (en Alsace comme dans la Loire) et, là aussi, la typicité est “gommée”. Ceux qui élèvent ces vins jouent le jeu de la mondialisation du goût, face à laquelle, faute d’originalité, nous ne pouvons que perdre si l’on se met en concurrence avec des vins australiens, chiliens ou autres, qui n’attendent que cela.

Franchement, c’est quand même mieux de déboucher un Sancerre qui développe ces nuances de “silex”, un Bandol où le Mourvèdre s’épanouit, un Saint-Julien marqué par l’élégance, un Pomerol par son sous-sol de “crasse de fer” ou un Gevrey-Chambertin aux notes giboyeuses…

Voilà pourquoi nous devons continuer à combattre les vins sans originalité, standardisés, au même titre que le poulet ou le pain sans saveurs. Notre force, c’est d’avoir notre originalité, cette spécificité rare, qui, du plus grand des grands crus au vin le plus modeste, signe un vin original, artisanal, dans son sens le plus noble. On est loin de l’arrogance, de la frime des chais flambants neufs, de l’épaisseur d’un dossier de presse ou de ceux qui ne pensent qu’à engranger des sous.