La région saint-émilionnaise pourrait avoir une classification des sols aussi précise que l’Alsace et la Bourgogne.
La thèse du Pr Van Leeuwen (que l’on peut se procurer sur le net) est la référence pour comprendre les sols du Libournais, notamment ceux où le stress hydrique (et l’apport en azote) fait la différence entre un grand cru et un autre. Qui n’a pas observé sa carte des sols de la région ne peut pas comprendre les terroirs et les différences entre les plateaux, coteaux, pieds de côtes et vallées…
On le répète depuis bien longtemps : le Classement “officiel” de Saint-Émilion est une bonne blague. Il fallait attendre la décision d’Ausone (qui refuse dorénavant d’entrer dans ce jeu) pour que ce que nous avons toujours dit devienne l’évidence. Ausone, historique et vrai Premier GCC A, perché sur son monticule a été “rejoint” par d’autres vins (sont pas dans le Guide, ne les cherchez pas). Un vrai tour de magie. La pilule pour faire passer cela : le terroir n’aurait plus beaucoup d’importance mais l’argent et les relations publiques, et les bonnes grâces de certains, seraient devenus les critères !
D’une manière générale, les plus grands vins se retrouvent sur des sols de calcaire à astéries, qui vont du centre de la commune de Saint-Émilion, sur le plateau, puis d’une bande tout autour de sols calcaires sur molasses du fronsadais, et se poursuivent sur les zones similaires des satellites jusqu’à Fronsac.
En fait, si l’on s’attachait à restituer la véritable qualité intrinsèque des sols, il faudrait que l’on intègre ceux de Montagne/Saint-Georges ou Puisseguin/Lussac provenant notamment de sols calcaires ou argilo-limoneux sur calcaire dur (plateaux, coteaux et pieds de côtes) à ceux de Saint-Émilion.
Pas mal d’autres crus se contentent de sols siliceux, de limons, de sables jusqu’à profiter de nappes d’eau permanentes… Vous allez donc trouver des vins dans cette appellation dont les prix frisent l’insolence : 90 €, 150 € et beaucoup plus… quand d’autres, à plaisir et qualité semblables se situent entre 20 et 45 €.
La qualité des millésimes
Beaux millésimes 2022, 2020, 2019, 2018, 2016, 2015, 2010 et 2009, le 2008 un ton en-dessous, 2006, 2004 et 2001, éclipsés à tort par le 2005 ou le 2003. les 2014 et 2011 sont très classiques et charmeurs, comme le 2007. Le 2013 n’a pas beaucoup d’intérêt. Quelques crus ont remarquablement réussi le 2003, d’autres beaucoup moins, notamment ceux qui sont trop “confiturés”. Débouchez les millésimes 2007 à 1990 en ce moment, et notamment le grandissime 1995. Certaines bouteilles de 1994 et 1993, notamment, sont surprenantes d’évolution. Voir La Vintage Code
Il faut plus que jamais tirer un coup de chapeau aux propriétaires de talent qui élèvent les véritables grands vins de Saint-Émilion, satellites compris, du plus grand des grands crus au plus modeste.