* Coups de cœur et déceptions/3 : Provence et Rhône

Cette semaine, deux régions qui me tiennent à cœur tant j’ai suivi de près l’évolution des vins depuis le premier Guide. J’ai toujours adoré le Lubéron (ah !!! les bals d’été de Ménerbes et Bonnieux) et la grande Provence (moins la côte, souvent galvaudée), longtemps passé mes vacances ici, en étendant mes péribles de Bormes-les-Mimosas en Avignon, de Bandol à Mougins, de Roquebrune-Cap Martin à Châteauneuf-du-Pape. J’y ai beaucoup d’amis, certains très proches, vignerons, artistes ou restaurateurs, bref, je connais les querelles de clochers (celles de Châteauneuf…), les purs et durs et les margoulins.

Encore pas mal d’éliminés tant de vins rouges m’ont déçu cette année, de moins en moins typés, de plus en plus “barriqués”, trop concentrés. À leurs côtés, un bon nombre de cuvées garantes d’un mal de crâne, en blancs, et aussi en rosés pour lesquels c’est la fuite en avant, tant ces vins semblent devenir l’eldorado. Et certains rapports qualité-prix sont tout bonnement inexcusables, dans les trois couleurs. C’est pourtant lui qui doit compter, associé à une typicité réelle, sans se laisser prendre au jeu des cuvées spéciales, où les raisins spécifiques à la région sont ridiculement remplacés par le Cabernet-Sauvignon par exemple (les bonnes exceptions sont rares).
Misez donc sur ces propriétaires qui laissent s’exprimer au mieux les grands cépages Grenache, Mourvèdre, Cinsault, Rolle ou Ugni blanc, dans ces terroirs complexes, argilo-calcaires, caillouteux, graveleux ou sableux, élèvant des vins formidables dans toutes les appellations provençales.

En Provence, mon Classement n’est pas trop chahuté pour l’instant. En rosés, j’ai « sorti » Rimauresq et Rouvière, et j’ai été assez déçu par des rosés des Côtes de Provence qui nous matraquent le crâne. Il s’agit donc de ne pas se tromper. Les Bandol retenus sont de grandes valeurs sûres, les Coteaux d’Aix appuient leur légitimité, certains Coteaux Varois progressent et s’affirment avec talent.

En Blancs, ce sont souvent les mêmes qui atteignent les sommets : Saint-André-de-Figuière, Rasque, Fontlade, Saint-Louis (vrai coup de cœur), Fontcreuse, Maestracci et Peraldi pour la Corse, Bastide Blanche, Bunan et Lafran-Veyrolles, à Bandol. Et, croyez-moi, ce n’est pas le plusc facile de semaintenir au top comme ils le font depuis des années !

Pour les Rouges, il y a deux grands « styles » de vins : ceux qui conservent une prédilection pour la typicité, en faisant ressortir l’osmose des sols avec les cépages traditionnels (Cinsault, Grenache, Mourvèdre…). On se doute qu’ils sont ma préférence. Il y a Rasque, Jas d’Esclans, Houchart et ceux qui sont à la tête de cette hiérarchie, Ollières et Grand Fontanille qui progressent bien, comme Cabran ou Jas des Oliviers. Des déceptions et des déclassements avec Rimauresq encore (trop puissant, trop concentré, trop « dur »), Calissanne, Révaou, Fonscolombe, Saint-Jean-de-Villecroze, Suffrene, Rouet, Brigue, Sainte-Roseline (exposer des œuvres d’art n’est pas un but en soi pour un vignoble), Vannières… Ils seront largement remplacés par d’autres producteurs notamment par ceux des Coteaux Varois, une appellation où j’ai fait de très belles dégustations cette année. Et… gare aux prix des Côtes-de-Provence : une bouteillec de rosé à 15 €, il s’agit qu’elle soit vraiment bonne !

Pour Malherbe, j’attends. La chère Mireille Ferrari prend du champ et passe la main à son fils et à, une nouvelle équipe. Pas sûr que la qualité soit la même si la passion y est moins présente. Wait and see, donc.

On l’aura compris, pas mal de propriétaires, les uns plus imbus que les autres, ont cru qu’en s’offrant (fort cher) un vignoble dans le coin, ils allaient faire un « grand » vin. Pas si simple, donc.

En Rhône, cela fait longtemps que ne n’ai pas suivi la mode d’encenser des crus du « nord » (Hermitage, Côte-Rôtie…) comme s’y sont englués d’autres « critiques ». Il y a des prix inexcusables dans ce coin, et la qualité d’un vin n’est pas en rapport avec sa production trop minime) à l’hectare. Chapoutier et d’autre ne sont plus dans mon Classement depuis longtemps, et d’autres sont sur la voie (Guigal…). Ce n’est que de l’esbroufe ! Petrus n’a pas besoin de limiter sa production à 30hl/ha pour être le roi !

C’est souvent la même démarche à Cornas ou à Châteauneuf, hélas, et les seuls c… qui s’y laissent encore prendre sont les Américains ou les Japonais…

Que ce soit à 10 e ou à 30 e, il faut aujourd’hui payer juste et se méfier des cuvées “spéciales” qui ne méritent pas leur prix. Quand on débouche un Châteauneuf-du-Pape Mont-Redon ou Fortia à 20 € et que l’on en trouve un autre au double (et plus, hélas), quand on ouvre un Côte-Rôtie de Drevon à 25 € et que je reçois des cuvées du Lubéron, de Cornas ou de Saint-Joseph au même prix, il y a de quoi se poser des questions. Autre gamme avec les cuvées de Redortier ou celles des remarquables caves de Rasteau ou Visan, qui devraient faire revenir sur terre ceux qui font des vins qui ne leur arrivent pas à la cheville, à des prix bien plus élevés. Les rendements trop limités, l’élevage abusif en barriques… ne sont pas forcément des gages de qualité. Le terroir et la main de l’homme font la différence, et cela se retrouve dans le Classement 2010.

Dans cette grande région, mieux vaut frapper à la porte des vignerons qui ne singent pas les snobs bordelais et s’attachent à élever des vins classiques (mais modernes) à des prix sages. Pour les grandes ppellations, on le voit avec Mont-Redon, Drevon, Vieux-Lazaret, Fortia On peut rester humble et élever des vins formidables.

Dans les appellations où le rapport qualité-prix-typicité est exceptionel, deux caves s’imposent : celles de Rasteau et de Visan. À leurs côtés, une foule de vignerons : Redortier bien sûr, puis Moulin du Pourpré, Canorgue, Montine, Verquière, Champ-Long, Deurre, Beauvalcinte… à des prix qui feraient rougir un grand nombre de soi-disants « seigneurs ».

Des déclassés, il y en a : la Cave de Gigondas, Cabrières, Charbonnières, Despesse, Grangette, etc… et pas mal de déceptions dans les appellations Tavel et Lirac, entre autres.

Les grands millésimes : 2008, 2005, 2004, 2003 et 2001 (et 2000, superbe), 98, 96, 95, 89, 88, 85, 83, 78, 70, 67 et 61.
Les bons : 2007, 2006, 99, 97, 94, 90, 86, 82, 81.

Semaine prochaine : les prochains Classements des Bourgogne, rouges et blancs, où l’on aura aussi des surprises…

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