* L’envoûtant Léoville-Barton

J’apprécie, depuis mon premier Guide, Anthony Barton, qui, avec un charme et une prestance qui lui sont propres, peut être fier d’être resté fidèle à la grande tradition médocaine, ce qui n’est pas si courant. Il a développé avec son épouse, Eva, ces propriétés qu’ils gèrent aujourd’hui avec leur fille Lilian Barton-Sartorius.

Les 45 ha du Château Léoville-Barton et les 15 ha du Château Langoa sont plantés dans un sol de graves et un sous-sol composé d’argile, un terroir très typique de Saint-Julien. La forte proportion de vieilles vignes permet d’obtenir la meilleure qualité possible. L’encépagement est constitué de 72 % de Cabernet-Sauvignon, 20 % de Merlot et 8 % de Cabernet franc. Les 2 propriétés bénéficient des mêmes soins attentifs, que ce soit à la vigne ou au chai.

Anthony Barton est partisan d’un élevage traditionnel des vins et résiste aux phénomènes de mode, “où la course à une trop grande technicité nuit à la qualité et à l’élégance des vins”, aime-t-il préciser. À la dégustation, les vins sont certainement l’archétype de ce que doivent être des grands crus de Saint-Julien. Ils présentent une belle robe de couleur profonde, sont très équilibrés et amples en bouche, révèlent un joli bouquet aux arômes très fins avec de la persistance. Leurs qualités s’expriment plus par une très grande élégance plutôt que par une puissance ou une concentration excessive qui risqueraient de masquer la typicité du terroir.

Superbe Saint-Julien 2005, très typé, d’une grande complexité aromatique avec ses notes caractéristiques de cerise noire, de poivre et d’épices, très équilibré, de très belle garde. Formidable 2004, l’un des plus beaux vins de la presqu’île dans ce millésime de grande race, où l’élégance vient épauler une structure dense, un très grand vin, très classique comme on les aime, où le terroir s’est exprimé tout particulièrement, qu’il faut savoir attendre. Le 2003 est très représentatif de ce millésime atypique, un vin charmeur, velouté, riche, qui permet d’attendre l’évolution des millésimes qui l’entourent comme ce superbe 2002, concentré, dense, très riche, un grand vin savoureux, riche en couleur comme en charpente, aux tanins fermes et fins à la fois, prometteur. Exceptionnel 2001, un grand vin très distingué, très fin, ample, aux connotations de cerise confite, de sous-bois et de cannelle, un vin puissant, aux tanins enrobés, qui poursuit une fort belle évolution. Le 2000 est un superbe vin, de couleur soutenue, de bouche puissante, riche, très fin, bien charnu, de garde. Remarquable 99, au bouquet développé avec des nuances épicées et giboyeuses, un vin complet, aux tanins présents et harmonieux.

Une précision (très) importante : à l’heure où la frime envahit les vignobles, où le nouveau venu qui vendra le plus cher va se targuer de faire un « grand » vin, quand des crus réputés atteignent des prix incautionnables et totalement injustifiés, les vins d’Anthony Barton bénéficient d’un rapport qualité-prix-typicité réellement exemplaire (vous lisez bien) : 65 € le 2004 chez ChateauNet, c’est très compréhensible, et c’est à comparer à des prix déments cités dans mes précédents articles (1, 2) ou à ceux des cuvées de garage que l’on trouve au fin fond de Saint-Émilion ou du Languedoc.

Ici, à ce prix, on est bien au sommet des grands vins de Bordeaux.

Millesimes

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