* Vins d’Alsace, attente et déception

Brigitte Dussert : depuis 3 ou 4 ans, vous semblez déçu par certains vins d’Alsace…

Patrick Dussert-Gerber : j’aime l’Alsace, origines obligent, et, cette année, les conditions climatiques ont été délicates, et les rendements habituels, très importants dans cette région, ne sont pas un atout pour réussir le 2007. Il fallait être très sévère sur les rendements. Paradoxalement, un certain nombre de vignerons alsaciens ont un problème : c’est leur richesse ! Quelques-uns commencent à s’endormir sur leurs lauriers puisqu’ils vendent très bien leurs vins depuis des années. Je trouve que les vins d’Alsace que l’on goûte sont décevants depuis quelque temps, les vins sont trop mous, manquent justement de cette acidité, c’est pour cela que le 2007 sera un bon retour aux sources. Je suis souvent déçu par des vins qui ont moins de typicité, qui sont de plus en plus ronds, qui manquent de fraîcheur. Ils sont “douceâtres”, avec de forts taux de sucres résiduels. Que ce soit le résultat d’un réchauffement climatique ou une façon de faire des vins plus souples, je le regrette, et il y aura d’ailleurs un bon nombre d’éliminés dans mes prochaines sélections. Je préfère un vrai riesling, frais, franc que l’on a plaisir à déboucher sur une douzaine d’huîtres, plutôt qu’un Pinot gris qui a le même goût qu’un Gewurztraminer, et dans lequel il est bien difficile de trouver une quelconque trace de minéralité.

Même les Vendanges Tardives sont parfois des vins trop gras, on a perdu cette notion de vivacité, de fraîcheur, qui signent d’ailleurs les grands vins liquoreux de garde. En 2007, la qualité dépendra de la conscience professionnelle du vigneron, et il faudra vraiment frapper à la bonne porte.

Attention à la complexité des terroirs, voire à l’amalgame entre des crus et des lieux-dits et à leur multiplication sur les étiquettes où l’on se perd… Les millésimes 2005, 2004, 2002 et 2001 sont savoureux, le 2003 a été beaucoup plus délicat à vinifier (en Vendanges Tardives, misez sur les 2004, 2001, 2000, 97 ou 89).

Voir le Classement 2008

Ce qu’il faut retenir :

Riesling. C’est le prince des raisins alsaciens. Les vins qui en sont issus sont secs, fruités et nerveux, subtilement bouquetés et de très grande classe. Le Riesling croît à merveille près de Turckheim, Dambach-la-Ville, Ribeauvillé, Riquewihr, Kaysersberg, Mittelwihr et Guebwiller. C’est le cépage le plus tardif.

Gewurztraminer. Plus alcoolisé que le Riesling, charpenté, de saveur épicée et très parfumé, le Gewurztraminer est un vin qui vieillit parfois remarquablement bien. Son bouquet intense développe de riches arômes de fruits, de fleurs ou d’épices (gewurz veut dire épicé). Puissant et séducteur, parfois légèrement moelleux, c’est souvent un vin de garde. Les “vendanges tardives”, c’est-à-dire soumises à une maturité excessive, sont quelquefois époustouflantes, étonnantes de richesse d’arômes et d’onctuosité. Bons terroirs : Bergheim, Turckheim, Sigolsheim, Barr, Dambach-la-Ville, Pfaffenheim…

Pinot gris. Vin corsé et opulent, d’une belle robe jaune, d’aussi grande allure que le Riesling et le Gewurztraminer, peut-être encore plus puissant et violent que ce dernier, chargé autant en alcool qu’en arômes. Excellents vins de vendanges tardives. Les meilleurs proviennent des terroirs du Riesling et de Rouffach, Ribeauvillé ou Wintzenheim.

Muscat d’Alsace. Vin sec, frais et fruité, au goût musqué, exhalant parfaitement la saveur de son raisin. Charmant à boire à l’apéritif. Bonnes étapes à Ribeauvillé, Gueberschwihr et Mittel­wihr.

Sylvaner. Le Sylvaner est frais et léger, avec un fruité discret. Agréable et désaltérant, il sait montrer une belle vivacité (Sigolsheim, Turckheim).

Chasselas. Arraché de plus en plus, le chasselas produit une majorité de vins légers et faciles à boire.

Pinot blanc. Plus corsé et souple que le Sylvaner, délicatement bouqueté et assez charpenté, c’est un vin très agréable à boire frais.

Pinot noir. Le Pinot noir est le seul cépage en Alsace à produire un vin rouge ou rosé dont le goût fruité typique évoque la cerise. Vinifié en rouge, il peut être élevé en barriques de chêne, ce qui ajoute à ses arômes une structure plus charpentée et plus complexe.

Crémant d’Alsace. L’AOC Crémant d’Alsace couronne les vins d’Alsace effervescents, vifs et délicats, élaborés selon la méthode traditionnelle (comme en Champagne), principalement à partir du Pinot blanc, mais aussi du Pinot gris, du Pinot noir, du Riesling ou du ­Chardonnay. Ces vins sont aujourd’hui parmi les meilleurs Crémants de France. Le Crémant rosé, plus rare, est issu du seul Pinot noir.

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